Phénomènes Lunaires transitoires
Un phénomène lunaire transitoire (PLT), terme créé en 1968 par l’astronome sir Patrick Moore (LTP, Lunar Transient Phenomena) consiste dans l’apparition d’une lumière ou d’une modification d’aspect de la surface lunaire pendant une courte durée.
Des signalements de tels phénomènes remontent à plus de mille ans, certains d’entre eux ayant fait l’objet d’observations indépendantes de multiples témoins . Historiquement, le premier LTP observé par cinq moines de la cathédrale de Canterbury est un flash lumineux qui se produit le 18 juin 1178 et est à l’origine du cratère Giordano Bruno. Cependant la majorité des rapports de PLT ne sont pas reproductibles et ne s’accompagnent pas des témoignages vérifiables adéquats permettant d’établir un distinguo entre différentes hypothèses envisageables. Par surcroît, peu de ces phénomènes ayant fait l’objet de publications dans des revues scientifiques à comité de lecture. Ainsi, seuls 2 % des rapports d’observation (53 sur 2 806) rédigés entre les années 1700 et 2010 sont considérés comme de véritables PLT.
Les hypothèses privilégiées aujourd’hui sont le dégazage le long de fissures lunaires, la formation de décharges électriques au sein de ces gaz (par effet triboélectrique) ou les impacts qui se produisent sur des échelles de temps géologiques.
Les PLT signalés varient depuis les nappes de brume jusqu’aux changements permanents d’aspect de la surface lunaire. Cameron les classe en cinq catégories, savoir :
- (1) phénomènes gazeux, y compris les brumes et autres formes d’obscurcissements ;
- (2) phénomènes de colorations rougeâtres ;
- (3) phénomènes de colorations vertes, bleues ou violettes ;
- (4) phénomènes d’éclaircissements ;
- (5) et phénomènes d’assombrissements.
Les explications pour les PLT se répartissent en quatre classes : les dégazage, les impacts, les phénomènes électrostatiques, et enfin les conditions d’observation défavorables.
Dégazage
Certains PLT peuvent être causés par l’échappement du gaz contenus dans des cavités souterraines. Un grand nombre de ces événements gazeux ont présenté une teinte rougeâtre, alors que d’autres se sont révélés sous la forme de nuages blancs ou d’une brume indistincte. La majorité des PLT paraît associée à des cratères dont le sol est fracturé, à des rebords de mers lunaires, ou à d’autres localisations que les géologues relient à l’activité volcanique. Cependant, on note qu’il s’agit des cibles les plus courants des observateurs de la Lune, et cette corrélation peut résulter d’un biais observationnel.
Au crédit de l’hypothèse du dégazage, des données du spectromètre à particules alpha de Lunar Prospector indiquent des dégazages récents de radon en surface. En particulier, les résultats montrent que le gaz radon émanait du voisinage des cratères Aristarque et Kepler pendant la durée de cette mission de deux ans. Ces observations peuvent s’expliquer par la diffusion lente et visuellement imperceptible de gaz vers la surface, ou par de discrètes explosions. Pour soutenir le dégazage explosif, le récent changement d’une surface lunaire d’environ 3 km a été suggéré comme le résultat d’un événement de libération gazeuse. Cependant, on pense que cet événement remonte à environ un million d’années, ce qui suggère que ce genre de phénomène important ne se produit que peu fréquemment.
Impacts
Sur la surface de la Lune, des impacts se produisent en permanence. Les événements les plus courants sont associés avec les micrométéorites, comme on peut en rencontrer avec les pluies de météores. Des observations terrestres multiples et simultanées ont permis de détecter des éclairs d’impacts de tels événements. Il existe des tableaux des impacts enregistrés par caméra vidéo pendant plusieurs années depuis 2005, dont un grand nombre est associé avec les pluies de météores. De plus, des nuages d’impacts furent détectés après que se sont écrasés les vaisseaux SMART-1 de l’ESA, la sonde d’impact lunaire indienne, et LCROSS de la NASA. Les impacts laissent des cicatrices visibles sur la surface de la Lune, et on peut les détecter par l’analyse de photos prises avant et après l’événement, à condition qu’elles aient une résolution suffisante. Les sondes Clémentine (d’une résolution globale de 100 m., surfaces sélectionnées 7–20 m.) et SMART-1 (résolution 50 m.) n’ont identifié aucun cratère formé depuis l’ère des vaisseaux Apollo.
Étude : A large lunar impact blast on 2013 September 11
Phénomènes électrostatiques
On a suggéré que les effets reliés à soit des charges, soit des décharges électrostatiques pourraient être la cause de certains PLT. Il serait possible que des effets électrodynamiques liés à la fracture des matières proches de la surface pourrait charger les gaz qui seraient présents, tels que le vent solaire ou des produits de désintégration de radio-éléments. S’ils devaient se produire près de la surface, la décharge émanant de ces gaz pourrait donner naissance à des phénomènes visibles depuis la Terre. On a proposé par ailleurs que la charge triboélectrique des particules de poussière en suspension dans un nuage de gaz pourrait générer des décharges visibles depuis la Terre. Enfin, la lévitation électrostatique de poussière près du terminateur est susceptible d’être la cause de certaines formes de phénomènes visibles depuis la Terre
Conditions d’observation défavorables
Il est possible que de nombreux phénomènes transitoires ne soient pas associés avec la Lune elle-même, mais qu’elles puissent résulter de conditions d’observation défavorable ou de phénomènes associés à la Terre. Par exemple, certains phénomènes transitoires signalés concernent des objets proches de la résolution maximale des télescopes employés. L’atmosphère de la Terre peut provoquer des distorsions temporelles significatives que l’on peut confondre avec de vrais phénomènes lunaire (voir seeing). D’autres explications n’invoquant pas la Lune incluent les visualisation des satellites en orbite autour de la Terre et des météores, ou d’erreurs observationnelles.
Le problème le plus significatif des signalements de PLT consiste en ce que la grande majorité d’entre eux a été faite soit par un unique observateur soit depuis un seul point d’observation sur la Terre (soit encore les deux). La multitude des rapports de PLT affectant un même “endroit” de la Lune pourrait être présenté comme une preuve à l’appui de leur existence. Cependant, en l’absence des témoignages visuels de multiples observateurs situés en de multiples points sur Terre pour un “même” événement, il faut les considérer avec prudence. Comme exposé ci-dessus, une hypothèse également plausible de la cause de la majorité de ces événements serait l’atmosphère terrestre. Si un événement pouvait être observé en deux endroits différents de la planète au même moment, cela pourrait être considéré comme une preuve contre l’hypothèse de l’origine atmosphérique.
Des observations sont actuellement coordonnées par l’Association of Lunar and Planetary Observers et la British Astronomical Association pour ré-observer des sites où des phénomènes lunaires transitoires qui ont été signalés dans le passé. En documentant l’aspect de ces sites avec les mêmes conditions d’éclairage et de libration, il est possible de juger si certains signalement étaient simplement dus à une fausse interprétation de ce que l’observateur a considéré comme une anomalie. De plus, avec des images digitales, il est possible de simuler la dispersion spectrale atmosphérique, le flou du seeing astronomique ou la dispersion de la lumière par notre atmosphère pour déterminer si ces phénomènes peuvent expliquer certains des rapports originaux de PLT.